Sherman Swift était un enfant de 11 ans qui vivait à Petrolia, en Ontario, quand il a perdu la vue en essayant de faire exploser un jouet représentant un puits de pétrole avec de la poudre, en 1889. Le futur champion de la Bibliothèque d’INCA a étudié dans les écoles pour personnes aveugles en Ontario et au Michigan et par la suite, il a suivi des cours à McGill et à l’University of Toronto, écoutant attentivement les conférences, copiant des notes en braille et demandant à ses amis et à ses proches de lui faire la lecture. Au fil du temps, il a accumulé des distinctions universitaires et, en 1907, il est devenu le premier diplômé aveugle d’une université canadienne dans un cours de langues modernes.
Sherman Swift avait l’intention d’enseigner, mais on lui a refusé un certificat en raison de sa cécité. Quinze ans plus tard, un certificat lui a été accordé, mais à ce moment-là, il avait entrepris la carrière qui deviendrait le travail de sa vie à la Bibliothèque d’INCA. Cette carrière a commencé en 1909, lorsqu’il est devenu secrétaire de la Canadian Free Library for the Blind prenant la relève de Marion Robinson au poste de bibliothécaire quelques années plus tard. Grâce à son travail à la Bibliothèque, il est devenu l’un des fondateurs d’INCA et le bibliothécaire en chef de la division de la Bibliothèque et de la publication, un poste qu’il a occupé jusqu’à sa mort en 1947.
Un profil précoce de ce bibliothécaire « modeste et attachant » défini par le Toronto Daily Star est intitulé « Un homme aveugle extrêmement talentueux est le poète aveugle de Toronto, SC Swift : Il a été le premier de sa classe à l’Université McGill, il maîtrise les langues modernes et l’art oratoire, il est secrétaire de la Bibliothèque pour les personnes aveugles dont le taux de prêt par habitant est supérieur à celui de toute autre bibliothèque dans le monde, et il saute par-dessus les tramways en mouvement. »
Sa participation à l’établissement d’un système universel de braille utilisé dans le monde anglophone, au lieu de systèmes multiples en place au début du siècle, est l’une de ses nombreuses réalisations en tant que bibliothécaire en chef. Son article nécrologique d’INCA soulignait qu’il avait présidé une bibliothèque qui a évolué d’un fonds de quelques centaines de volumes imprimés en relief en 1909 à « une bibliothèque moderne avec ses milliers de pieds carrés d’espace et ses étagères qui tolèrent le poids de plus de 24 000 volumes en braille et en Moon, des enregistrements musicaux et plusieurs milliers de disques de livres parlés ».
Sherman Swift a adopté le rôle de gardien que les bibliothécaires de l’époque s’appropriaient couramment, se considérant comme un gardien de la moralité des clients de la Bibliothèque lors de l’achat ou du prêt de matériel douteux. Par exemple, il s’est plaint de « la quantité croissante d’absurdités sexuelles publiées en braille » relativement aux ouvrages que la bibliothèque avait : « Plusieurs ouvrages qui m’ont obligé à donner des ordres stricts à mon assistant responsable des prêts; ces ouvrages doivent être prêtés uniquement avec le plus grand soin et non sans connaissance de l’âge, du degré d’éducation et, si possible, du caractère moral des emprunteurs potentiels. En cas d’incertitude relativement à ces points, ces livres restent ici, un point c’est tout ».
Swift tenait une correspondance volumineuse. Lorsqu’il est mort en 1947, les lettres ont afflué, dont une qui disait : « Il sera difficile... de trouver un successeur à la hauteur d’un tel homme, mais ce qui importe le plus pour moi est la perte de la personnalité de ce brave combattant qui, à vrai dire, était digne des héros de Dieu ». Dans son article nécrologique d’INCA, Swift a été reconnu comme « la personne toute désignée pour un travail dans une bibliothèque pour des personnes aveugles au Canada et l’une des figures les plus importantes dans ce domaine sur le continent. »